Dans le cadre de la Biennale de l’art africain contemporain et de l’exposition photo « Yaay Dund – Régénérer le vivant », une série de tables rondes a été organisée par l’Institut Sénégalais de Recherches Agricoles (ISRA) les 03 et 04 décembre 2024 au Monument de la Renaissance.

La première journée, portée par l’ISRA-BAME, a été dédiée au thème « Agroécologie, Genre et Dynamiques territoriales » avec deux tables rondes et des performances artistiques (théâtre forum et slam) qui ont enrichi les débats et mis en lumière la situation actuelle ainsi que les perspectives concernant les initiatives de transition agroécologique, en tenant compte du genre et de la territorialisation de ces actions au Sénégal, notamment dans le département de Fatick.

Le premier panel, intitulé « Le futur de l’agriculture dans le département de Fatick : quelle place pour l’agroécologie ? », était composé des représentants de l’Agence Régionale de Développement (ARD) de Fatick, de la DyTAEL de Fatick, d’AgriSud Sénégal et des mairies de Fatick et de Palmarin. Les différentes interventions ont montré que la transition agroécologique est déjà bien engagée à Fatick et représente une solution pertinente pour le développement territorial, notamment face aux enjeux des changements climatiques, de la réduction des terres arables et de la préservation des ressources naturelles. Les intervenants ont également souligné l’importance de la collaboration avec la recherche pour bâtir un territoire résilient, tout en reconnaissant l’impact positif des approches agroécologiques sur les populations locales et la nécessité de pérenniser ces pratiques pour l’avenir de l’agriculture au Sénégal. L’agroécologie est présentée comme une nécessité, voire une obligation, pour garantir la résilience et la durabilité des systèmes agricoles et, par ricochet, le développement territorial.

Le second panel, « Genre et agroécologie – Catalyseurs de la transformation durable des systèmes agricoles », était dédié aux dynamiques de genre, avec des représentants d’organisations telles que One CGIAR, DyTAES/ENDA Pronat, MASAE, ISRA-BAME et CIRAD. Le rôle central des jeunes et des femmes dans la transition agroécologique a été mis en avant, et il a été constaté que ces dernières sont plus sensibles aux pratiques agroécologiques. Les échanges ont également porté sur l’importance de la gouvernance et du leadership dans la promotion des pratiques agroécologiques, en tenant compte de la dimension genre pour transformer les systèmes agro-alimentaires et renforcer leur résilience.

L’utilité de l’art comme méthode de communication scientifique a été appréciée à travers les œuvres et l’intervention du Dr. Raphael Belmin, chercheur au CIRAD et instigateur de l’exposition photo Yaay Dund. Alliant souvent art et agroécologie dans ses approches, Dr. Belmin précise que « l’art peut enrichir la recherche scientifique en capitalisant sur les expériences et en favorisant le questionnement ».

À l’initiative de l’ISRA-CNRF, une table ronde sur le concept de Village Intelligent face au Climat (VIC) s’est tenue le deuxième jour, avec l’intervention de la FNDASP, de l’ISRA-CNRF, de l’ISRA-BAME, de la commune de Daga Birame et de l’Agence belge de coopération (ENABEL), en présence des partenaires scientifiques, techniques et financiers.

Les panélistes, composés de chercheurs de l’ISRA, du représentant du FNDASP et d’un producteur bénéficiaire du projet, ont mis en avant le succès du projet Village Intelligent Face au Climat (VIC) dans la promotion d’une agriculture résiliente face au changement climatique en Afrique de l’Ouest. Ce projet, mis en œuvre par l’ISRA à travers le CNRF et d’autres structures de recherche de l’institut, repose sur une approche participative et interdisciplinaire qui a permis d’améliorer les pratiques agricoles, de renforcer les revenus des communautés et de restaurer les écosystèmes.

Face au succès du modèle VIC dans le village de Daga Birame, l’Enabel a financé, à travers le FNDASP, son extension dans huit communes des régions de Kaolack, Fatick et Kaffrine. Les défis liés à cette mise à l’échelle dans des contextes différents et à la pérennisation des acquis ont été abordés, ainsi que l’importance de la communication et de la sensibilisation pour favoriser l’adoption de ce modèle par d’autres communautés.

Le sens de ce projet pour les communautés bénéficiaires et les retombées positives pour celles-ci ont été mis en scène par la troupe Kankouran à travers une performance artistique énergique.

En résumé, ces trois tables rondes ont mis en lumière des modèles réussis de résilience et de transition agroécologique – la DyTAEL et les VIC – à l’échelle locale et les défis de pérennisation face à la multiplicité des acteurs impliqués. Ils ont également permis d’aborder la situation des politiques publiques agricoles, soulignant la nécessité de les articuler, ainsi que les chantiers pour une meilleure prise en compte du genre et la réduction des inégalités dans le secteur agricole. La synergie des différents acteurs et l’appropriation par les communautés sont essentielles pour réussir la transition agroécologique au Sénégal et l’adaptation de l’agriculture face au changement climatique en Afrique de l’Ouest.